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Home ›France – Conseil d’Etat, 8 février 2017, N°396695
France - Law: n° 91-647 of 10 July 1991
France - Administrative Justice Code
L’octroi du statut de réfugié, du fait de risques de persécutions liées à l’appartenance à un groupe social fondé sur une orientation sexuelle commune, ne doit pas être subordonnée au fait que cette orientation sexuelle soit rendue publique par la personne voulant obtenir le statut de réfugié. Le groupe social n’est pas institué par ceux qui le composent mais par le regard porté sur ces personnes par la société environnante.
Il est exclu que le requérant d’asile doive, pour éviter les persécutions dans son pays d’origine, dissimuler son orientation sexuelle.
Il n’est pas obligatoire que l’appartenance à un groupe social fondé sur l’orientation sexuelle fasse l’objet d’une disposition pénale spécifique pour affirmer que ce groupe social est soumis à un risque de persécution. En effet ce risque peut également se fonder sur des dispositions de droit commun abusives ou encore sur des comportements émanent des autorités, qu’ils soient encouragés, favorisés ou simplement tolérés
Le requérant demande au Conseil d’Etat d’annuler une décision N°15009118 de la Cour Nationale de droit d’asile du 31 août 2015. Cette décision rejetait son recours contre une précédente décision rejetant de sa demande d’asile, le 28 janvier 2015, auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Il demande également au Conseil d’Etat de régler l’affaire au fond et de lui accorder le statut de réfugié. Enfin il demande que soit mis à la charge de l’Etat le versement de la somme de 2000€ au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le Conseil d’Etat considère d’abord l’article 1 paragraphe A, 2° de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et du protocole signé à New York le 31 janvier 1967, pour noter qu’un individu peut être considéré comme réfugié, si du fait de son appartenance à un certain groupe social, il craint d’être persécuté.
Il poursuit ensuite en définissant le terme groupe social comme un groupe de personnes partageant « une identité propre perçus comme étant différente par la société environnante ou par les institutions ». Il en découle que, du fait de certaines conditions propre à un pays, des personnes peuvent à raison de leur orientation sexuelle, constituer un groupe social au sens des dispositions précitées. Il s’agit d’une appréciation au cas par cas fondée sur le regard que porte sur ces personnes la société environnante ou les institutions.
Le Conseil d’Etat affirme ensuite que l’octroi du statut de réfugié, du fait de risques de persécutions liées à l’appartenance à un groupe social fondé sur une orientation sexuelle commune, ne doit pas être subordonnée au fait que cette orientation sexuelle soit rendue publique par la personne voulant obtenir le statut de réfugié. En effet, le groupe social n’est pas institué par ceux qui le composent mais par le regard porté sur ces personnes par la société environnante. De plus, il est exclu que le requérant d’asile doive, pour éviter les persécutions dans son pays d’origine, dissimuler son orientation sexuelle. Le Conseil d’Etat ajoute ensuite qu’il n’est pas obligatoire que l’appartenance à un groupe social fondé sur l’orientation sexuelle fasse l’objet d’une disposition pénale spécifique pour affirmer que ce groupe social est soumis à un risque de persécution. En effet ce risque peut également se fonder sur des dispositions de droit commun abusives ou encore sur des comportements émanent des autorités, qu’ils soient encouragés, favorisés ou simplement tolérés.
Selon le Conseil d’Etat, il appartient à la Cour Nationale de droit d’asile d’apprécier ces éléments au vue des arguments des parties et surtout du récit personnel du requérant d’asile. Si la Cour ne peut pas exiger qu’il apporte une preuve de son orientation sexuelle, elle peut néanmoins rejeter un recours si elle considère que les arguments du requérant ne sont pas suffisamment étayés.
Le Conseil d’Etat termine en affirmant que la Cour Nationale de droit d’asile a entaché sa décision d’erreur de droit. Après avoir relevé que l’orientation sexuelle du requérant était établie, la Cour a cependant rejeté sa demande car elle considérait que « ni les pièces du dossier ni les déclarations du requérant ne permettaient de tenir pour établis les faits allégués et les craintes évoquées ». Or, selon le raisonnement du Conseil d’Etat, la Cour n’a pas apprécié la réalité des persécutions auxquelles le requérant disait être exposé. Elle n’a également pas recherché si au regard des critères énoncés ci-dessus, les personnes homosexuelles en Côte d’Ivoire constituaient un groupe social.
Demande accordée en ce que le requérant est fondé à demander l’annulation de la décision attaquée du 31 août 2015.
L’affaire est renvoyée devant la Cour Nationale de droit d’asile.
This case summary was written by Laure Joly, LLM student at Queen Mary University, London.